Lorsqu’il acheva le dernier volume des Chroniques de Narnia, Clive Staples Lewis (1898-1963) était loin de se douter qu’elles feraient de lui un grand nom de la littérature pour la jeunesse, domaine qui ne recouvrait qu’une partie de son oeuvre romanesque et théologique. Membre, avec son ami J.R.R. Tolkien, du très sélect groupe des Inklings d’Oxford, Lewis, malgré le succès de Narnia, a toujours considéré Tant que nous n’aurons pas de visage comme sa plus grande réussite littéraire et intellectuelle. Ce conte philosophique, adaptation du mythe de Cupidon et Psyché (tiré des Métamorphoses d’Apulée), est une réflexion subtile et atemporelle sur les questions de l’obscurantisme, de la grâce et du libre arbitre. Orual, fille aînée d’un roi barbare, retrace son parcours sous la forme de confessions adressées à des «hommes plus sages», dans l’espoir qu’ils pourront un jour juger de la vindicte qui l’oppose aux dieux. Eduquée à la philosophie par son mentor grec, l’enfant a développé très tôt un esprit de résistance aux croyances du royaume, dominé par le culte tyrannique de la déesse Ungit. Foi, trahison et repentir rythment le récit de ses bouleversantes réminiscences, marquées par le sacrifice de sa demi-soeur et par sa propre accession au trône.